L’entretien de recrutement est-il un exercice de séduction ?
Pierre DAVEZE2022-08-28T13:40:39+02:00Beaucoup de recruteurs évaluent de manière intuitive leurs candidats.
La vraie raison est qu’ils ne savent pas évaluer et formaliser de manière rationnelle le besoin du poste en matière de comportement, de motivations et d’aptitudes. Ils ne savent donc pas objectivement sur quels traits de personnalité se baser pour conduire leur entretien et comment orienter leur questionnement.
Évaluer un candidat devient alors un pur exercice de démonstration, voire de séduction. C’est le jeu du chat et de la souris qui ouvre la porte à une joute de manipulations de part et d’autre.
Et c’est d’ailleurs principalement pour cette raison que la discrimination subsiste et que la Diversité a du mal à voir le jour dans la majorité des entreprises.
Nos recherches sur l’efficacité du recrutement intuitif révèlent que le réflexe de tout recruteur intuitif est de retenir des personnes qui lui ressemblent, ou qui pensent comme lui/elle, alors que le seul accord ne doit se faire que d’après les Valeurs de l’Entreprise, et pas du tout « sur la tête du candidat ».
Recruter n’est pas chercher à sélectionner les candidats qui plaisent au recruteur !
Car recruter c’est engager l’entreprise et engager les collaborateurs déjà en place.
Recruter c’est détecter les candidats qui réussiront dans ce poste, avec les enjeux précis du poste, et en tenant compte de l’environnement humain existant : collègues, managers, clients, fournisseurs, sous-traitants…
Lorsqu’il n’y a pas de profilage du poste (tant pour sa mission et que pour ses enjeux) et pas d’évaluation rationnelle du profil du candidat, on ne peut pas parler d’évaluation professionnelle. Dans ce cas, qu’évaluons-nous ? C’est d’ailleurs pour cela que les entreprises sérieuses pratiquent l’assessment (évaluation en situation) pour leurs décisions importantes : promotions internes, pourvoir un poste à fort enjeu, choisir parmi ses cadres le futur directeur de filiale, départager deux candidats internes ou externes pour un même poste…
En revanche, les entreprises qui n’ont pas recours à des évaluations objectives ne font que réduire leurs entretiens de recrutement à des exercices de séduction : j’aime ce candidat ou je ne l’aime pas… en traduisant par « je le sens bien dans ce poste… ou pas ». Si moi, recruteur, je me sens en harmonie avec ce candidat, alors je le recrute… Mais où va-t-on ?
Et ce qui est invraisemblable pour l’entreprise c’est que cela se produit en France dans plus de 90% des processus de recrutement ! 9 entreprises sur 10 ne font aucun profilage rationnel et donc aucun recrutement professionnel.
Mais il ne faut pas incriminer les DRH car la psychologie n’est pas leur spécialité, et encore moins la psychométrie. Ils ne peuvent pas créer tous les outils dont ils ont besoin et ne peuvent que mettre en œuvre ce qui existe déjà sur le marché. Cela commence par un « Référentiel de compétences de savoir-être » (soft-skills) et une méthode de profilage de poste.
Sans cela, le résultat des recrutements est simple : ces exercices de séduction mutuelle ne sont que des démonstrations de l’égo et ne sont pas des processus de décision dignes du terme Recrutement. Appelons-les des Embauches ! Ce sont des Embaucheurs… pas des Recruteurs (ce qui reste tout de même indispensable lorsque l’entreprise a besoin de main d’œuvre).
Pourquoi faut-il professionnaliser les recrutements ?
Simplement parce que ces jeux de séduction et de dérives de l’égo sont à l’origine de plus de 80% des situations de souffrance au travail et de 75% des pertes de productivité RH des entreprises. Soit parce que ce candidat sera mal à son poste et non performant, soit parce qu’il essayera de s’en tirer en manipulant son environnement et en créant de fait de la souffrance autour d’eux. C’est ainsi que l’on voit plus de 45% des managers en France ne pas avoir le profil pour manager correctement…
Dans toutes nos missions de Diagnostic de souffrance au travail, il est ressorti que la personne victime ou incriminée n’avait pas le profil du poste qu’elle occupait, ou même du métier concerné, ou encore qu’elle ne fût pas équilibrée pour collaborer avec, ou manager celle(s) devenue(s) en souffrance. En effet, les outils psychométriques modernes permettent de savoir si la personne a développé sa personnalité en harmonie avec son Essence… ou pas.
Voilà un vrai levier de performance et d’attractivité. C’est d’ailleurs la base de la notion du « Talent » et du « Potentiel » (Potentiels : aptitudes les plus faciles à développer en Talent).
Et puis où est la bienveillance dans cette démarche de recrutement intuitif ?
Si le recruteur ne met pas toutes les chances de son côté pour apparier le poste avec le bon candidat (et arrêter de choisir le moins pire, faute de candidats), alors on peut parler de malveillance ou d’incompétence…
Oui, cela fait mal à lire… mais il faut nous sortir de ces dérives devenues monnaie courante depuis 1950…
Trop de recruteurs « embauchent » aujourd’hui au feeling, à l’aveugle, sans aucun professionnalisme et sont à l’origine de 80% des cas de souffrance au travail et des faibles performances de l’entreprise. Non seulement l’image de l’entreprise attire (ou non) les meilleurs candidats (c’est la notion de Corporate Branding), mais parmi ceux qui se présentent avons-nous celui ou celle qui convient au poste ou faut-il relancer une campagne de sourcing ? Sans outil d’évaluation, on ne sait pas répondre à cette question.
Malheureusement, lorsque nous proposons à ces recruteurs de se professionnaliser, nous avons toujours la même réponse « Oh, Moi Je… suis très doué.e pour décoder les candidats ; j’ai un don, une formidable intuition pour sentir s’ils correspondent au poste ou non ».
Ces prises de position ne sont que des manifestations d’une inflation de l’égo du recruteur ! La preuve, si vous avez plusieurs recruteurs dans votre entreprise, faites passer les mêmes candidats individuellement devant chaque recruteur, vous verrez que le candidat retenu ne sera pas le même.
Donc si l’entreprise change de recruteur, les profils des collaborateurs changeront et donc leurs aptitudes ainsi que l’attractivité de l’entreprise. Est-ce professionnel ?
Ne serait-ce pas plus sérieux de définir les aptitudes requises pour occuper le poste et de profiler chaque candidat avec un outil psychométrique non manipulable ?
Bien entendu, la décision finale ne vient pas de l’outil et reste du domaine de l’alchimie humaine et du partage des valeurs, mais l’outil psychométrique évite 80% des risques que prennent le recruteur et le manager opérationnel dans leur décision.
Malheureusement, aujourd’hui, presque aucune entreprise n’a une approche rationnelle et « Responsable » dans ce métier de recrutement. Oui Responsable, car le fait de profiler le poste et le candidat pour conduire l’entretien sur les écarts entre les deux profils est une démarche de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).
Ce sont les candidats les plus malins qui vont profiter de cette faiblesse pour manipuler le recruteur
Beaucoup de candidats intelligents, autant acteurs de théâtre que manipulateurs, savent très bien que pour un poste de commercial il faut être extraverti et sociable, pour un poste de Technicien il faut être structuré, discipliné, organisé et fiable, ou encore que pour une position de Manager il est bon d’être entraînant et positif. Mais qu’en est-il du comportement réel du candidat une fois dans le poste ?
Et l’expérience montre que beaucoup de ces candidats malins et manipulateurs sont capables de prendre sur eux pour tenir pendant toute la période d’essai. Mais après, le naturel revient au galop… C’est là qu’apparaissent les tensions, les conflits, et que s’installe la souffrance au travail.
Lorsque le candidat a joué son spectacle lors de son entretien pour convaincre son recruteur qu’il correspond tout à fait au poste, le recruteur, bien que séduit, n’a en fait aucune garantie que ce candidat réussira dans son poste. La « prédictivité » est justement le rôle d’une psychométrie.
Avec juste le CV, prédictivité fiable à 20 ou 30%, avec une psychométrie, la prédictivité passe à 80%.
Et tous nos clients qui testent cette démarche sont surpris du résultat !
Quelle est la conséquence d’un recrutement dit « intuitif » ?
Nos deux activités de diagnostic des Risques Psychosociaux et de diagnostic de performance RH, démontrent que les 4 principales raisons qui, en même temps, apportent la souffrance au travail et une baisse importante de productivité des équipes (et donc de l’entreprise), se situent justement dans la phase RH de Recrutement.
Ces 4 cas générateur de souffrance et de perte de productivité ont les origines suivantes :
- Matching poste / Candidat : le candidat ne sera pas performant dans ce poste car il ne présente pas les compétences de savoir-être (soft-skills) requises par ce poste, c’est à dire qu’il ne présente pas les meilleures compétences de savoir-faire attendues dans le poste car il lui manque des savoir-être pour soutenir ses savoir-faire. En effet, beaucoup de savoir-faire nécessitent des aptitudes (savoir-être).
C’est par exemple le cas de 50 % des Commerciaux et de 60 % des Managers qui n’ont pas le profil pour tenir leur position. Un exemple chez les Commerciaux : le savoir-faire « Négocier » pour un commercial fait appel à la soft-skill « Ecoute », qui s’appuie sur le trait de personnalité « Empathie ». Donc sans Empathie, le Commercial aura des capacités très réduites à la négociation, même s’il suit une formation sur ce sujet. Certes ce Commercial pourra suivre des formations de Négociation, mais son degré d’acquisition de cette compétence sera très réduit. Et puis dans un entretien de recrutement d’une heure, le candidat sait qu’il doit faire très attention à son écoute et il le fera. En revanche, une fois sur le terrain, il imposera son avis à ses prospects pour signer plus vite, sans pour autant décoder ses vrais besoins. C’est d’ailleurs une dérive très fréquente que nous constatons dans notre vie face à un Commercial…
Ceci est également la preuve que l’évolution de la GPEC des Entreprises vers les Soft-skills permet d’éviter le gaspillage des budgets de formation. En effet, nous avons mesuré que 70% des budgets de formation ayant rapport à la relation à l’autre sont gaspillés du fait d’envoyer en formation des personnes n’ayant pas les aptitudes désormais requises à l’acquisition de ces compétences. - Le candidat a été initialement mal orienté : il ne s’est pas naturellement orienté vers un métier correspondant à son Essence, et n’a, de ce fait, pas en réalité les aptitudes naturelles pour pratiquer le métier qu’il a choisi. D’ailleurs beaucoup de Burn-out sont la conséquence d’une telle erreur d’orientation. En effet, environ 65% des jeunes sont perdus lorsqu’ils doivent choisir une filière après le Bac. Malheureusement ils sont trop souvent influencés par le besoin de réaliser le rêve de leurs parents, ou par l’école qui est juste à côté de chez eux. Mais quel métier est fait pour leur permettre de s’épanouir, ils ne le savent pas car ce n’est pas non plus la démarche que suit le processus des bilans de compétences depuis 15 ans.
Nous avons tant vu de candidats arborant des diplômes prestigieux comme HEC ou encore Sup de Co sans avoir les aptitudes requises pour faire du commerce… C’est aussi la raison principale qui fait que, à diplôme identique, un jeune réussit alors que 2 autres galèrent. - Le poste a mal été dimensionné : dans beaucoup de cas d’échec de Collaborateurs, nous avons constaté que le poste exigeait des aptitudes contradictoires. Par exemple être en même temps innovateur et procédurier. Lorsqu’on profile un poste, si on utilise une méthode de profilage, le RH détecte qu’il faut redécouper les délégations ou l‘organisation autrement. Profiler un poste permet également de dimensionner de manière raisonnable le classement des candidats selon des critères prioritaires et d’autres secondaires. Le Recruteur et le N+1 prendront donc leur décision sur les critères rationnels et réalistes, tout en identifiant les risques éventuels que le Manager pourra suivre en priorité.
- L’environnement de travail ne correspond pas à la personnalité du candidat, soit l’inverse : la phase « Casting » de la Gestion des Talents est donc à prendre en compte et ne peut non plus se reposer que sur des critères « à la tête du candidat ». Grâce à une psychométrie professionnelle, le Manager est capable d’identifier les points de vigilance qu’il aura à suivre personnellement, ou les actions de briefing ou de formation des autres membres de l’équipe pour favoriser une bonne intégration (et encore plus lorsqu’il s’agira de profils atypiques ou de personnes en situation de handicap psychique).
Sans méthode de profilage ni critère rationnel pour évaluer les aptitudes du candidat au regard d’un poste, toute la décision du recrutement repose uniquement sur le fait que le candidat puisse rassurer ou pas son recruteur qu’il correspond au poste. Nous appelons cela « le moulage » : le candidat essaye de tout faire pour entrer dans le moule du poste ! Le recrutement se transforme alors en jeu de séduction.
C’est également ainsi que beaucoup de personnes toxiques arrivent facilement à s’introduire au sein des équipes et créent les Risques Psychosociaux. Les candidats intelligents et surtout les manipulateurs, futurs toxiques ont beaucoup de facilités à « se mouler » pour s’introduire dans de belles entreprises.
Pourquoi cette mode des « soft-skills »
Beaucoup pensent que c’est une nouvelle mode (pour faire bien) et veulent paraître modernes en attachent ce terme de « soft-skills » à leur fonction. Il en va de même avec ces termes de « Chasseur de Talents » ou « Développeur de Talents ». Mais les Soft-skills et la Gestion des Talents ne sont pas de la cosmétique ! Ils découlent bien au contraire d’un nouveau domaine RH, né en 1972 et introduit en France vers 2010 : le développement des compétences de savoir-être (soft-skills). Le second processus RH rentable après la Formation Continue, apparue vers les années 50.
Il s’agit de mettre à disposition des DRH et des cabinets de Recrutement de nouveaux dispositifs, peu coûteux et faciles à réaliser, sans entrer dans un processus de création d’assessment center, plus lourd en matière de formation et de mise en œuvre.
Un entretien de recrutement ne doit être ni un jeu de séduction, ni une séance de manipulation, ni rester un simple inventaire de compétences prétendues et des diplômes annoncés.
Rappelons que quelques pourcents des CV citent des diplômes qui n’existent pas, 30% des CV font effet de postes dont ils ont changé le titre, arrangé le niveau de responsabilité, ou encore louant des expériences réussies, mais oubliant que le salarié n’a pas réussi seul. Enfin, 90% des CV énumèrent des compétences de savoir-être (soft-skills) qui sont fausses.
Pourquoi fausses ?
Simplement car les candidats ne se connaissent pas réellement ou ne sont pas objectifs dans leur évaluation, ou tout simplement parce qu’ils ne mettent pas tous la même définition derrière un même mot.
C’est pourquoi l’évaluation du savoir-être (aptitudes / soft-skills) est indispensable et doit se faire avec des outils psychométriques professionnels et fiables (non manipulables).
C’est pour cela que Alorem a développé plusieurs suites de tests de personnalité professionnels, destinés à prédire le degré de réussite d’un candidat dans un poste, qu’il soit atypique, neurotypique ou même en situation de handicap psychique). Ce nouveau processus de recrutement ne demande que 1 (minimum) à 5 journées de formation, et permet à l’équipe RH de suivre ensuite autant l’évolution dans le temps des postes, que celle des collaborateurs, et donc de l’harmonie Poste / Collaborateur.
Quel est ce nouveau domaine de la Gestion des Talents ?
La Gestion des Talents est le processus le plus évolué à ce jour pour la partie Développement des Ressources Humaines.
Elle permet de prolonger pendant toute la vie du collaborateur cette congruence entre les postes qu’il occupe ou qu’il vise. Non seulement nous évoluons tous au fil des années et des expériences, mais le besoin de l’entreprise (et donc des postes) évolue également au fil du temps. Par exemple Peugeot a su transmettre le message à ses Managers de développer leur empathie pour offrir une meilleure écoute et une plus grande reconnaissance des équipes. Tous les profils de postes de Managers ont été mis à jour pour rendre concrète l’attente de l’entreprise. EDF a su envoyer le message à ses cadres, nécessaire à une plus grande satisfaction des clients et à une amélioration de leur compétitivité à l’occasion de l’ouverture à la concurrence européenne.
Faire évoluer le référentiel des métiers vers les comportements attendus par le marché, ou encore pour se démarquer de ses concurrents par sa qualité relationnelle et donc son attractivité, est devenu le quasi premier challenge des dirigeants éveillés ;
Puis ce processus de recrutement se poursuit en interne, lors des promotions internes, des mobilités et des réorganisations. Le challenge étant d’optimiser en permanence l’harmonie entre les postes et les collaborateurs.
Il faut souligner aussi que le ROI d’un tel dispositif est de 6 € de gain pour 1 € investi. Le ROI est donc de 5 ! La Gestion des Talents est devenue la clé de l’évolution de la Gestion des Ressources Humaines vers un équilibre entre rentabilité et prévention santé.
La Gestion des Talents couvre avantageusement tous les domaines du Développement RH : Recrutement, évolutions de carrières, promotions, mobilité, reconversions, bilans de compétences, reclassements thérapeutiques, transformation de l’entreprise.
Enfin, il est le seul dispositif RH rentable capable de supprimer la souffrance au travail et de favoriser une réelle inclusion de la Diversité.
En résumé… en quelques chiffres
Une erreur de recrutement vous coûte de 2 à 6 mois de salaire chargé (sans compter les problèmes d’image et de non-qualité), alors qu’une campagne d’assessment lors de vos recrutements coûte moins de 16 % d’un salaire chargé (profilage de poste + test de personnalité des 10 meilleurs candidats). Utiliser des tests de recrutement est donc un investissement 25 fois plus rentable que de ne pas en utiliser…. Qui a un argument contre cela ? 😉